Quand on a dans sa généalogie, une ascendance en France, on peut s'attendre à avoir des professions que l'on ne trouvera pas nécessairement en Belgique. La surprise fut alors à la fois de taille et pittoresque. Mais au fur et à mesure de mes recherches, ma curiosité devenait grandissante. Mes ancêtres dans les Yvelines (France), portant le nom de VIDOU, étaient des vignerons de père en fils. Une profession très rude et qui dépendait d'une certaine météo. Dans le livre intitulé "Essai médical sur les professions, métiers, etc.", écrit en 1804, on peut y lire ceci : "... les jeunes vignerons, déjà vieillis par le travail, avoir le corps courbé en devant, la poitrine rentrée en dedans, la colonne épinière arquée en avant, en un mot, être plus ou moins difforme...". Les mots sont durs, mais le travail l'est tout autant. Pour découvrir cette famille qui fait partie de mon ascendance, nous devons retourner au milieu du XVIIème siècle, dans le village de Saulx-Marchais (Yvelines - France). Allons-y, suivez-moi...
Le 18 octobre 1638 naît mon ancêtre Guillaume VIDOU à Saulx-Marchais (Yvelines - France), petit village d'environ 300 habitants qui se trouve à 50 km de Paris. Il est marié à Marie FREVILLE et le couple a au moins 2 enfants. Alors que Guillaume est presque âgé de 60 ans, sa fille décède à l'âge de 24 ans. C'est grâce à cet acte , qui date du 27 mai 1698, que l'on apprend que Guillaume est vigneron (voyez l'acte ci-dessous, souligné en rouge). C'est par conséquent la première génération de vignerons.
Mais qu'est-ce qu'un vigneron et que fait-il exactement? Par définition, le vigneron est la personne qui cultive une vigne, qui en récolte le raisin pour le transformée en cuvée, enfin qui élève en vin1. C'est un travail qui commence le 22 janvier, jour de la St-Vincent (patron des vignerons) avec la taille et qui se termine en décembre avec le sarmentage. Dans l'ensemble, les vignerons sont bien considérés dans la société rurale, car le vin rapporte davantage que le blé : même les petites exploitations (un hectare) arrivent à vivre2. Mais revenons à notre famille VIDOU.
Guillaume décède en 1703 et son fils Louis part en 1706 ou 1707 s'installer avec sa mère dans le village voisin qui s'appelle Auteuil-le-Roi (plus connu sous le nom d'Auteuil). Il s'y marie en 1707 avec Jeanne BRINDELLE, dont le père était tonnelier. Louis aura 8 enfants et on le retrouve mentionné pour la première fois "vigneron" en février 1733 à Auteuil. Louis est la seconde génération connue de vignerons. Il l'est encore mentionné en 1736, 1744, 1750 et 1754, année de son décès. Ci-dessous, une carte qui date de 1766 et qui situe Auteuil (Auteuil-le-Roi) et Saulx-Marchais qui se trouve juste à côté.
Son fils Guillaume, né en 1713 à Auteuil est mentionné pour la première fois "vigneron" en 1740 (troisième génération qui se met en route). Il travaillera avec son père sur les vignes qu'il possède. Quand son père décède, Guillaume continue d'être vigneron (mentionné comme tel en 1756 et 1759) et il le sera jusqu'à son décès en 1763. Son fils Louis Seutin VIDOU ouvre la 4ème génération de vignerons. Né en 1756, il est déjà mentionné "vigneron" à Auteuil dès 1782. Concernant le patrimoine de Louis Seutin à cette époque, je n'ai à l'heure actuelle aucun document. Mais en voyant les possessions de 1819 le concernant et de son fils Jean-Baptiste, on peut estimer qu'il devait avoir (approximativement) : 35 ares de terres (pour la culture), 8 ares de vignes et 5 ares de bois.
A Auteuil, les cépages dominants sont "le Meunier" en rouge et "le Meslier" en blanc. Ces cépages étaient assez fins, surtout le dernier, qui donnait au vin blanc d'Auteuil, une réputation locale méritée.
Louis Seutin se marie une première fois en 1782 avec Marie Hélène BREVAL (mon ancêtre), fille de laboureur. Le couple aura 8 enfants. Devenu veuf en 1804, il se remarie en 1810 avec Marie Rosalie BRETILLARD. Une fille naîtra de cette union. Louis Seutin sera encore mentionné vigneron en 1810 et 1811. Mais pour une raison que j'ignore, il change de profession et on le retrouve comme Garde-champêtre dès 1817. En 1819, il est propriétaire de 2 maisons à Auteuil. Voyez ci-dessous les 2 extraits de la carte d'Auteuil du Cadastre napoléonien.
L'une se trouve dans le hameau "la Hourdière" (à gauche, entouré de pointillés rouges) et qui comprend une cour, un jardin, une terre et des vignes tout au bout. Et la seconde se trouve dans le hameau "la Grande Rue" (à droite, voir pointillés rouges) et qui comprend aussi une cour, un jardin et une terre.
Louis Seutin sera Garde-Champêtre jusqu'à son décès en 1834 à l'âge de 77 ans. Sa fille Louise Hélène VIDOU (mon arr. arr. arr. arrière grand-mère) se marie et part vivre sur la région de Maubeuge (Nord - France). Sa sœur Geneviève se mariera avec un vigneron d'Auteuil qui possèdera encore plus de vignes. Par contre son frère Jean-Baptiste sera vigneron dès 1817 et il le restera jusqu'en 1843 (année à laquelle il devient tisserand et il le sera quelques années). Le fils de Jean-Baptiste, qui s'appelle également Jean-Baptiste, ne sera pas vigneron, mais marchand de vin en 1843.
Mais le métier de vigneron se perd petit à petit à cause de différentes maladies qui s'installent et qui attaquent les vignes. Cela donnera comme conséquence des récoltes en baisse, des vignes malades et qui meurent. Dès le début des années 1870, les hectares de cultures continuent de diminuer, le nombre de vignerons diminuent fortement également. Malgré tout, certains persistent et continuent la profession de vigneron. Ci-dessus, une ancienne carte postale d'Auteuil de 1903-1905 montrant les vendanges.
Il est possible que les "VIDOU" étaient des vignerons depuis plus longtemps. L'avenir et de nouvelles archives pourront peut-être me confirmer cela, ou pas. Mais actuellement, je peux confirmer que je descends de 4 générations de vignerons, de père en fils et qui s'étalent sur plus de 110 ans. Lorsque l'on fait de la généalogie, on croit parfois que la famille a très peu bougée géographiquement. Et pourtant, les découvertes peuvent parfois être très surprenantes... Même si cette ascendance est lointaine, j'en suis fier et je reste admiratif de tant de travail familial.
1 : La France en héritage, BOUTET Gérard, Ed. Perrin, 2007.
2 : Généalogie facile, collection Hachette.
Le prochain article sera le premier d'une nouvelle catégorie qui s'appellera " Patrimoine et objets familiaux" et qui aura pour titre : A la découverte d'un objet familial peu banal...
A mercredi prochain...
Écrire commentaire